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CHUTE DE LA MONARCHIE D’ORLÉANS

de français admis près d’elle, dans la crainte de le compromettre. Depuis son veuvage, d’ailleurs ; il vivait dans une entière solitude.

Je quittai Laeken, sans avoir aperçu le roi Léopold avec lequel j’avais pourtant d’anciens rapports et après avoir pris rendez-vous pour le lendemain matin.

En retournant à Bruxelles, j’allai visiter la petite chapelle de Laeken, où les restes de la reine Louise étaient déposés pendant la construction d’un tombeau plus splendide mais qui ne sera certainement jamais, aussi touchant.

La Belgique tout entière était encore sous le deuil, et c’était les larmes dans la voix que chacun, sans être interrogé, prononçait l’éloge et le nom de notre chère, douce, bonne et sainte Reine.

Elle avait été la consolatrice, la bienfaitrice de tous, en général, et de chacun, en particulier. Jamais souveraine n’a pu laisser une mémoire plus généralement adorée.

Le désespoir du Roi et l’extrême tendresse que lui avait témoignée la reine Louise dans ses derniers moments l’avaient un peu relevé dans l’affection de ses sujets ; mais, cependant, il n’était guère aimé à cette époque.

Ma première conversation avec la Reine ayant déblayé le terrain, et l’éloge obligé du duc de Montpensier et de la duchesse d’Orléans ayant été fait, j’abordai le reproche qui était dans le fond de ma pensée, en lui disant combien elle manquait à son rôle de chef de famille.

Elle devait maintenant l’exercer et faire valoir son autorité. C’était indubitablement la tâche laissée par le Roi ; elle lui était dévolue. Elle avait le droit et le devoir de la mener à bonne fin.

La Reine m’écoutait avec beaucoup d’attention, mais