Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome I 1921.djvu/70

Cette page a été validée par deux contributeurs.
63
LE VICOMTE DE SÉGUR

vicomte profita de son crédit ; son père était ministre de la guerre, fit envoyer son régiment en garnison dans la ville voisine du château de madame de Z…, joua son rôle parfaitement, feignit une passion délirante et, après des assiduités qui durèrent plusieurs mois, parvint à plaire et enfin à réussir.

Bientôt madame de Z…, se trouva grosse ; son mari était absent et même monsieur de Thiard. Elle annonça au vicomte son malheur. La veille encore, il lui témoignait le plus ardent amour ; mais, ce jour-là, il lui répondit que son but était atteint, qu’il ne s’était jamais soucié d’elle. Seulement, il avait voulu se venger du sarcasme de monsieur de Thiard, et lui montrer que son esprit était propre à autre chose qu’à faire des distiques de confiseur. En conséquence, il lui baisait les mains, elle n’entendrait plus parler de lui. En effet, il partit sur-le-champ pour Paris, racontant son histoire à qui voulait l’entendre.

Madame de Z…, honnie de son mari, déshonorée dans sa province, brouillée avec monsieur de Thiard, mourut en couches. Monsieur de Z…, fut obligé de reconnaitre ce malheureux enfant que nous avons vu dans le monde, madame Léon de X…, et que l’esprit d’intrigue qu’elle possédait rendait bien digne de son père. Jamais le vicomte de Ségur n’a pu s’apercevoir qu’une pareille aventure, dont il se vantait tout haut, choquât qui que ce soit.

Voici un autre genre :

Monsieur de Créqui sollicitait une grâce de la Cour, et, en conséquence, faisait la sienne à monsieur et à madame de Maurepas. Une de ses obséquiosités était de faire chaque soir la partie de la vieille et très ennuyeuse madame de Maurepas ; aussi elle le soutenait vivement, et ses importunités avaient crédit sur monsieur de Mau-