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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

grandes entreprises cette année, car elle parait destinée à subir des désapointements. — Plaisanterie à part, je suis très fâchée que les bruyants préparatifs du départ de Monsieur n’enfantent qu’un voyage à Guilford ; qu’en dit l’ambassadeur de Sa Majesté près la Cour de Londres ? Si on eut chargé monsieur le comte de La Tour d’une telle place, il aurait lavé la tête à monsieur Pitt et peut-être même à Sa Majesté l’Empereur. Il faut avouer que nous avons bien de quoi former un brillant et surtout raisonnable gouvernement sans oublier le nouvel instituteur de la Ferme générale que j’ai encore vu hier. À propos de la société française, car, si je la quittais une fois, je ne serais peut-être pas tentée d’y revenir, monsieur de Boigne m’a raconté l’histoire très simple de ces douze pots de confitures commandés par ladite dame et dont il a seulement défendu à Georges de recevoir le paiement, et, en conscience, il faut qu’on n’ait guère le mot pour rire car je ne vois rien de moins propre à exciter la gaité ni même l’ironie. — Vous avez eu bien raison, cher papa ; c’est mardi que nous ferons notre entrée dans la capitale où l’on est bien les maîtres de se moquer de nous tant que l’on voudra car nous avons pris le parti, très sage selon moi, de ne pas même faire semblant de nous en apercevoir, et vogue la galère ! — J’aurai encore deux lettres de vous, j’espère, mais vous n’en recevrez plus qu’une de moi car la poste ne part pas demain. S’il fait beau, peut-être irai-je à un déjeuner public qu’on dit être un très joli coup d’œil. — Je vais aller rendre à madame Butler, sœur de lady Clifford, une visite qu’elle m’a faite avant-hier ; à propos, j’ai vu les Morgan qui m’ont beaucoup parlé de vous ; vous croyez bien que ce sujet de conversation ne m’a pas aisément fatiguée. — Adieu, mon cher papa, ma chère maman ; je vous embrasse l’un par l’autre.


dimanche, 1er septembre.

Je n’ai pas encore commencé une lettre depuis que je vous ai quittés, mes chers amis, avec autant de plaisir que celle ci : c’est la dernière que vous recevrez de moi et je me flatte