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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

ment. Abandonner une telle résidence, où il était établi régulièrement et canoniquement, pour aller prendre violente possession, malgré le clergé et le Pape, d’un diocèse italien était une lourde calamité et attirait sur sa tête ces haines cléricales qui ne pardonnent jamais.

Il arriva à Paris désespéré ; mon père, qui l’aimait tendrement, entra complètement dans sa situation. Ils en causèrent longuement et, après avoir pesé les inconvénients entre déplaire à l’Empereur et rompre avec les gens de sa robe, ils conclurent qu’il ne fallait pas assumer seul cette responsabilité. L’évêque de Nantes, du Voisin, et l’archevêque de Tours, Barral, avaient été promus à des sièges importants en Italie qui se trouvaient dans le même prédicament que celui de Florence. Mon oncle décida que l’acceptation de l’archevêque de Tours ne suffisait pas, mais que celle de l’évêque de Nantes entraînerait la sienne.

Monsieur du Voisin passait pour habile théologien, et il était le prélat le plus considéré de toute l’Église gallicane. Mon père approuva ce parti ; mon oncle, après l’avoir annoncé au ministre des cultes, alla faire sa cour à l’Empereur qui le reçut très bien. Les trois prélats désignés se réunirent plusieurs fois. Mon oncle logeait avec nous. Il nous raconta un matin que l’évêque de Nantes venait de partir pour Nantes, après un refus formel ; qu’en conséquence, il allait se rendre à Saint-Cloud avec le ministre des cultes pour y porter son propre refus. Monsieur de Barral n’avait encore aucune décision arrêtée.

L’évêque donna l’ordre de charger sa voiture de voyage pour retourner le lendemain à Nancy. Il resta longtemps à causer avec mon père et moi, récapitulant toutes les excellentes raisons qui rendaient le parti qu’il avait pris irrévocable. Il revint tard ; à dîner, on parla