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CHAPITRE iv


Le général de Boigne s’établit en Savoie. — Le cardinal Maury. — Madame de Staël. — Séjour à Aix. — Benjamin Constant. — Dîner à Chambéry. — Coppet. — Monsieur Rocca.

Ma vie a été si monotone pendant les dix années de l’Empire et j’ai pris si peu part aux grands événements que je n’ai guère de jalons pour fixer les époques. Je me bornerai à placer pêle-mêle, et sans égard aux dates, les divers souvenirs de ce temps qui ont rapport aux personnages de quelque importance, ou qui peindraient les mœurs du monde où je vivais exclusivement.

Monsieur de Boigne avait entrepris de bâtir en Savoie, où il avait acheté une propriété. Il avait commencé par y passer quelques semaines chaque été ; bientôt il y resta des mois. Enfin, séduit par l’immense importance que sa fortune hors de pair lui donnait dans sa patrie, il y fixa son séjour et il en est devenu le bienfaiteur. Beauregard se trouva alors une trop grande habitation pour le revenu qu’il m’avait laissé. Il fut mis en vente, acheté par le prince Aldobrandini Borghèse et je transportai mes pénates dans un petit manoir situé dans le village de Châtenay, près de Sceaux. La naissance de Voltaire dans cette maison lui donne prétention à quelque célébrité. Ce déplacement n’eut lieu qu’en 1812.

J’ai fait mention de mes rapports avec le cardinal Maury. Il fit précéder sa rentrée en France d’une lettre très servile adressée à l’Empereur ; celui-ci ne manqua