Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome IV 1922.djvu/290

Cette page a été validée par deux contributeurs.
285
MORT DE LA DUCHESSE DE WURTEMBERG

Ce même été de 1831, la princesse Marie, renonçant au métier d’écolière, quitta la route tracée par ses maîtres de dessin et se jeta dans une série de compositions qui excita leur admiration. L’Ivanhoé de Walter Scott, premier roman dont on lui permit la lecture, servit d’étincelle à son jeune talent.

J’ai vu les croquis qu’il lui inspira ; ils étaient surtout remarquables par l’intelligence des sujets. Ils la conduisirent à des études de costumes et de mœurs du moyen âge ; et, bientôt, abandonnant la fiction pour l’histoire, elle choisit, pour l’héroïne de nombreux dessins, cette même Jeanne d’Arc qu’elle a depuis reproduite dans des sculptures que les artistes les plus distingués ne renieraient pas.

Il est assez singulier que tous les enfants du Roi aient les plus grandes dispositions pour le dessin, la peinture, la sculpture (monsieur le prince de Joinville modèlerait aussi bien que sa sœur Marie, s’il avait le temps de s’en occuper) et que tous soient non seulement insensibles à la musique mais qu’elle leur produise même une sensation désagréable. Ordinairement, le goût pour les arts les fait tous accueillir favorablement dans une organisation qui leur devient commune.

Le mariage de la princesse Louise se négociait, surtout vis-à-vis d’elle-même, qui s’en souciait très peu. Uniquement dévouée à sa famille, la pensée de s’en séparer, dans ces temps de troubles, lui était cruelle, et le mari qu’on lui offrait et auquel elle s’est tendrement attachée depuis ne l’emportait pas alors dans son jeune cœur sur les affections dont il l’éloignait.

Dire qu’elle a été forcée serait absurde, pour qui connaît l’intérieur de ces princes si tendrement unis ; mais, il est bien sûr que tout ce qui l’entourait s’est relayé pendant trois mois pour obtenir son consentement à force