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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

l’on pouvait regarder les plus violentes crises comme passées, et la situation morale des esprits contribuait à rendre le voyage projeté agréable pour tout le monde. Il devait durer dix jours ; les invitations étaient divisées en trois séries. Je me trouvai faire partie de la première.

J’arrivai le lendemain du jour où la famille royale, se rendant à Fontainebleau, avait bien voulu s’arrêter à Châtenay et me renouveler de vive voix l’invitation officielle qui m’était parvenue.

C’était au commencement d’octobre ; il faisait un temps magnifique qui dura tout le voyage.

On me mena dans un très joli appartement, arrangé avec un soin minutieux pour l’agrément et la commodité. Un feu énorme réchauffait la chambre et le salon qui la précédait ; et, cinq minutes après mon arrivée, un valet de chambre entra, portant un plateau couvert de fruits, de gâteaux, de carafes de vin et d’eau à la glace.

Je ne fis point honneur à ces courtoisies, et, sortant de chez moi, pendant qu’on y préparait mon établissement, j’allai faire des visites dans le château.

Je vis successivement arriver les ambassadeurs de Naples, de Russie, le ministre de Prusse, quelques autres personnes du corps diplomatique ainsi que divers équipages dont les livrées ne me révélaient pas les propriétaires. Mes courses me menèrent à l’heure de la toilette. Les costumes étaient fort élégants, mais conservaient la simplicité de la campagne, excepté les jours destinés aux bals où l’on était plus paré mais pourtant sans pierreries.

Je trouvai dans le salon d’attente des aides de camp qui, me faisant traverser la salle du trône, me conduisirent dans le salon dit de famille. La Reine, les princesses et un assez grand nombre de dames s’y trouvaient déjà