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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

Berryer, se prétendait des pouvoirs spéciaux et prenait le nom de conseil de famille. Je ne suis pas assez initiée aux secrets pour savoir à quel droit.

Ce comité blâmait l’entreprise de madame la duchesse de Berry, aussi bien que la conspiration de la rue des Prouvaires. Monsieur Berryer se chargea de porter à la princesse une note, rédigée par monsieur de Chateaubriand, où il exprimait et motivait l’opinion et les sentiments de tous, ses collègues, en la conjurant de profiter des facilités offertes par le voisinage de la mer pour s’éloigner d’un lieu où sa présence était nuisible à ses propres intérêts.

Les facilités, en effet, étaient d’autant plus réelles qu’amis et ennemis y prêtaient également la main. Son arrestation ne pouvait être, à ce moment, que le résultat d’un zèle subalterne et maladroit.

Monsieur Berryer franchit donc, sans aucune peine, les obstacles qui devaient le tenir éloigné ; mais, arrivé à Nantes, la princesse lui fit attendre quelques jours une audience.

Il l’obtint enfin, avec des précautions dignes d’un chapitre de roman. Après avoir changé de guide, de monture, de déguisement, de mot d’ordre plusieurs fois dans une course de quelques heures, on l’introduisit dans une grande pièce où il trouva madame la duchesse de Berry.

Elle était entourée d’un groupe fort animé et plein d’entrain ; plus loin, le maréchal Bourmont et quelques anciens vendéens portaient un visage soucieux. Après les premiers compliments, monsieur Berryer, ne souhaitant pas s’éterniser dans un séjour aussi compromettant, demanda une audience ; on lui répondit qu’on l’entendrait en conseil.

La Régente s’assit à une table où prirent place