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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

vassent en ligne. Selon lui, Louisj XVIII devait attendre en Belgique la décision de son sort.

À la réception de cette dépêche, Pozzo éprouva le plus cruel embarras. Il savait la malveillance de l’Empereur pour la maison de Bourbon. Elle se trouvait encore accrue par la découverte d’un projet d’alliance, entre la France, l’Angleterre et l’Autriche, conclu pendant le congrès de Vienne par monsieur de Talleyrand dans des vues hostiles à la Russie.

La copie de ce traité, oubliée dans le cabinet du Roi, avait été envoyée par monsieur de Caulaincourt à l’empereur Alexandre pendant les Cent-Jours. Il n’y avait pas attaché grande importance, croyant que c’était une invention de Napoléon pour le détacher de l’alliance ; mais une seconde copie du traité ayant été trouvée dans les papiers enlevés à monsieur de Reinhard, il ne put conserver de doutes, et cette nouvelle cause de mécontentement s’étant jointe à tout ce qu’il reprochait dès l’année précédente au Roi, il était peu enclin à souhaiter son rétablissement. Aussi n’avait-il pas témoigné de répugnance à écouter les négociateurs envoyés de Paris, et il était difficile de prévoir ce qui pourrait en résulter.

Pozzo n’était brin Russe et avait grand envie de s’arranger en France une patrie à son goût, en y conservant un souverain qui lui avait des obligations personnelles. Il hésita quelque peu, puis alla trouver le duc de Wellington :

« Je viens vous confier le soin de ma tête, lui dit-il ; voilà la dépêche que j’ai reçue, voici la réponse que vous y avez faite. »

Il lui lut ce qu’il mandait à l’Empereur des dispositions du duc de Wellington qui persistait à avancer immédiatement sur Paris et à conduire Louis xviii avec lui.

« Voulez-vous, ajouta-t-il, avoir fait cette réponse et