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DÉJEUNER SUR L’ESCALIER

révolution. Toutefois ce respect n’a pas empêché sept tentatives d’assassinat sur George iii.

Les invités du pavillon avaient l’option de déjeuner dans leur intérieur ou de prendre part à un repas en commun dont sir Benjamin et lady Bloomfield faisaient les honneurs.

À moins d’indisposition, on préférait ce dernier parti, excepté, toutefois, quelques-unes des anciennes amies du prince qui, cherchant encore à cacher du temps l’irréparable outrage, ne paraissaient jamais qu’à la lumière, soin fort superflu et sacrifice très mal récompensé. La marquise d’Hertford en donnait l’exemple.

Je fus très étonnée en sortant de mon appartement de trouver le couvert mis sur le palier de l’escalier. Mais quel palier et quel couvert ! tous les tapis, tous les fauteuils, toutes les tables, toutes les porcelaines, toutes les vaisselles, toutes les recherches de tout genre que le luxe et le bon goût peuvent offrir à la magnificence y étaient déployés. Le prince mettait d’autant plus d’importance à ce que ce repas fut extrêmement soigné qu’il n’y assistait jamais, et qu’aucune délicatesse de bon goût pour ses hôtes ne lui échappait.

Il menait à Brighton à peu près la même vie qu’à Londres, restait dans sa chambre jusqu’à trois heures et montait à cheval ordinairement seul. Si, avant de commencer sa promenade, il rencontrait quelques nouveaux débutants au pavillon, il se plaisait à le leur montrer lui-même et surtout ses cuisines entièrement chauffées à la vapeur sur un plan, tout nouveau à cette époque, dont il était enchanté.

En rentrant, le prince descendait de cheval à la porte de lady Hertford qui habitait une maison séparée mais communiquant à couvert avec le pavillon royal. Il y restait jusqu’au moment où commençait la toilette du dîner.