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LA COMTESSE DE PÉRIGORD

trarié, moins il y aurait paru… Au contraire, il aurait été charmant pour moi… Je le savais bien, mais j’ai cette femme en horreur… J’ai cédé à cette répugnance, j’ai eu tort… Où je me suis trompée, c’est que je le croyais trop faible pour jamais oser me chasser. Je n’ai pas assez calculé le courage des poltrons dans l’absence ! J’ai fait une faute ; il faut en subir la conséquence et ne point aggraver la position en se raidissant contre… Je me soumets, et monsieur de Talleyrand me trouvera très disposée à éviter tout ce qui pourrait augmenter le scandale. »

Sous ce rapport elle a complètement tenu parole.

La douceur inespérée de madame de Talleyrand était compensée pour monsieur de Talleyrand par les tourments que lui causait madame Edmond. Elle s’était passionnée pour un autrichien, le comte de Clam, et, pendant que la femme légitime lui abandonnait la résidence de la rue Saint-Florentin, elle la fuyait sous l’escorte du comte. Monsieur de Talleyrand en perdait la tête.

Il était, d’un autre côté, persécuté par les désespoirs de la duchesse de Courlande, mère de madame Edmond, qui mourait de jalousie des succès de sa fille auprès de lui. En revanche, la princesse Tyszkiewicz, également passionnée pour monsieur de Talleyrand, n’était occupée qu’à lui adoucir la vie et à faire la cour la plus assidue à l’heureuse rivale à laquelle elle transférait ses hommages aussi souvent que monsieur de Talleyrand transférait son cœur, et, jusqu’à ce que madame Edmond, et peut-être les années, l’eussent fixé définitivement, cela était fréquent.

Jules de Polignac passa une grande partie de cet été en Angleterre. Il y était retenu pour accomplir son mariage avec une écossaise qu’il avait rencontrée à Paris.

Quoiqu’elle portât le beau nom de Campbell, il fallait peu s’arrêter sur la naissance qui n’était pas légitime, mais elle était belle et fort riche. Sa sœur était mariée à