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BAL CHEZ LE MARQUIS D’ANGLESEY

La marquise d’Anglesey avait, de son côté, épousé le duc d’Argyll. Elle n’était pas dans la catégorie des femmes divorcées et continuait à être admise chez la Reine et dans le monde. Toutefois ce second mariage avait été si prompt qu’on tenait qu’elle était, tout au moins, d’accord avec lord d’Anglesey pour amener leur divorce. Plusieurs filles (les ladys Paget) de dix-huit à vingt-deux ans résidaient chez leur père, mais allaient dans le monde menées par la duchesse.

Lord d’Anglesey avait eu la jambe emportée à la bataille de Waterloo. Son état très alarmant pendant longtemps avait excité un vif intérêt dans la société ; il en avait reçu des preuves soutenues. Pour témoigner de sa reconnaissance, il imagina de donner une grande fête à ses nombreux amis à l’occasion de son rétablissement.

On construisit une salle de bal à la suite des beaux appartements d’Uxbridge House, et tous les préparatifs furent faits par le marquis et la nouvelle lady d’Anglesey sur le pied de la plus grande magnificence. Les billets, dans une forme très inusitée, n’étaient au nom de personne. Lord d’Anglesey, en adressant ses remerciements à monsieur et madame un tel de leurs soins obligeants, espéraient qu’ils viendraient passer la soirée du… à Uxbridge House.

Un moment avant l’arrivée de la société, lady d’Anglesey, femme divorcée qu’on ne voyait pas, après avoir veillé à tous les arrangements, partit pour la campagne. Lord d’Anglesey, trop tendre et trop galant pour laisser son épouse dans la solitude, l’accompagna. De sorte qu’il n’y avait plus ni maître, ni maîtresse de maison là où se donnait cette grande fête. Les filles de la première femme en faisaient les honneurs et, par courtoisie, elles s’étaient associé mesdemoiselles Wellesley, filles de la seconde par son premier mari avec lequel elles demeuraient.