présentation à la Reine, me trouvant peu éloignée d’une petite femme très blonde que douze années d’absence avaient effacée de mon souvenir, elle dit à lady Charlotte Greville avec laquelle je parlais :
« Lady Charlotte, nommez-moi à madame de Boigne. »
C’était la duchesse d’York ; elle resta longtemps à causer avec nous sur tout et de toutes choses, avec une grande aisance et sans aucune forme princière.
Le lendemain, ma mère me mena faire des visites à toutes les princesses ; nous laissâmes des cartes chez celles qui ne nous admirent pas et la présentation fut faite.
La princesse Charlotte de Galles, mariée au prince de Cobourg, était encore plongée dans les douceurs de la lune de miel et ne quittait pas la campagne. Ma mère avait assisté à son mariage, béni dans un salon de Carlton House. Lorsque, plus tard, je lui dis combien je regrettais n’avoir pas partagé cet honneur, elle me répondit :
« Vous avez raison ; c’est un spectacle rare que l’héritière d’un royaume faisant un mariage d’amour et donnant sa main là où son cœur est déjà engagé. En tout, le bonheur parfait n’est pas commun ; je serai charmée que vous veniez souvent en être témoin à Claremont. »
Pauvre princesse !… Je ne fis connaissance avec elle qu’à un autre voyage. En ce moment, j’en entendais beaucoup parler. Elle était fort populaire, affectait les manières brusques attribuées à la reine Élisabeth qu’elle portait même jusqu’à avoir adopté ses jurons. Elle était très tranchée dans ses opinions politiques, accueillait avec des serrements de main les plus affectueux tous les hommes, jeunes ou vieux, qu’elle regardait comme de son parti, ne manquait pas une occasion de marquer de l’opposition au gouvernement de son père et de l’hostilité personnelle à sa grand’mère et à ses tantes. Elle pro-