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PROCÈS DE M. DE LA VALETTE

pour calmer les terreurs du vieillard, il mit son nom au bas d’un permis fait à celui de monsieur Ferrand, dans son cabinet, et entouré de sa famille pleine de reconnaissance.

C’est la seule preuve qu’on pût apporter qu’il eût repris ses fonctions avant le terme que fixait la loi. Je suppose que la remise de cette pièce aura beaucoup coûté à la famille Ferrand ; j’avoue que ce dévouement royaliste m’a toujours paru hideux. Monsieur de Richelieu en fut indigné. Il avait d’ailleurs horreur des persécutions, et, plus il s’aguerrissait aux affaires, plus il s’éloignait des opinions de parti. Ne pouvant éviter le jugement de monsieur de La Valette, il s’occupa d’obtenir sa grâce s’il était condamné.

De son côté, monsieur Pasquier, quoique naguère garde des sceaux, alla témoigner vivement et consciencieusement en sa faveur. Monsieur de Richelieu demanda sa grâce au Roi. Il lui répondit qu’il n’osait s’exposer aux fureurs de sa famille mais que, si madame la duchesse d’Angoulême consentait à dire un mot en ce sens, il la lui accorderait avec empressement. Le duc de Richelieu se rendit chez Madame et, avec un peu de peine, il obtint son consentement. Il fut convenu qu’elle demanderait la grâce au Roi le lendemain après le déjeuner. Il en fut prévenu.

Lorsque le duc de Richelieu arriva chez le Roi, le lendemain, le premier mot qu’il lui dit fut :

« Hé bien ! ma nièce ne m’a rien dit, vous aurez mal compris ses paroles.

— Non, Sire, Madame m’a promis positivement.

— Voyez-la donc et tâchez d’obtenir la démarche, je l’attends si elle veut venir. »

Or, il s’était passé un immense événement dans le palais des Tuileries ; car, la veille au soir, on y avait