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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

achevé de se perdre dans toutes ces émotions et ses larmes. C’est un obstacle de plus à lui faire arriver la moindre distraction.

La famille de M. de Chateaubriand est indigne pour elle ; croirez vous que L. de Chateaubriand, après avoir assisté avec elle à cette dernière et terrible scène de la mort, témoin de son dévouement si rare, si complet, si angélique, n’a pas même mis une carte chez elle, n’a pas éprouvé le besoin de lui exprimer sa reconnaissance au nom de toute la famille de l’ami qui sans elle aurait été livré à des gens de service…

Le portrait de Girodet est légué à St  Malo, ma tante le savait, elle a prévenu toute demande et fait écrire au maire qu’elle était chargée du soin de remettre ce legs à la ville natale de M. de Ch. Elle vient d’en faire faire une copie qu’elle garde, mais, hélas, qu’elle ne verra pas. Le buste en marbre de David est légué au chateau de Combourg. Ma tante attend que M. L. de Chateaubriand le fasse réclamer. Dieu sait avec quelle mauvaise grâce cela sera fait. Tout porte la trace des volontés de Mme de Chateaubriand. Elle a abusé de l’affaiblissement de son mari pour lui faire signer avant sa mort à elle toutes sortes de dispositions qui n’auraient pas été sa volonté à lui ; et, comme sa mémoire était tout à fait éteinte, il n’en avait nulle conscience.

C’est grand pitié !

M. Piscatory, que j’ai vu au moment de son départ pour Tours, m’avait promis de vous parler de moi.

Adieu, chère Madame, permettez-moi de vous demander d’écrire encore, d’écrire de tems à autre à votre pauvre amie. De tous les amis qui lui restent encore, elle dit que vous êtes celle de [qui] l’absence lui est le plus pénible. Vous nous viendrez en aide cet hiver.

Veuillez agréer l’hommage de mes bien tendres sentimens.