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DIFFICULTÉS DU CABINET MARTIGNAC

Or, Napoléon non seulement trouvait bon mais exigeait qu’on lui dît la vérité tout entière et même qu’on insistât pour faire prévaloir son opinion vis-à-vis de lui. Il admettait la discussion jusqu’à la contradiction. À la vérité, il n’agissait que d’après sa propre volonté, mais jamais il ne savait mauvais gré qu’elle eût été combattue au conseil ou dans le cabinet.

Monsieur n’entendait rien à cette manière d’agir, et quiconque lui opposait une difficulté, même puisée dans son propre intérêt, lui apparaissait en ennemi. Monsieur Pasquier fut assez longtemps à découvrir cette disposition pour permettre à son zèle d’aggraver sa situation et, lorsqu’il s’en fut aperçu, il ne continua pas moins à remplir ce qu’il considérait comme un devoir.

Devenu ministre de Louis XVIII, il lui fallut fréquemment heurter le parti ultra et conséquemment déplaire à Monsieur. Ces précédents ne lui permettaient pas d’entrer au conseil de Charles X, et il répétait aux ministres qui désiraient l’avoir pour collègue qu’il ne leur apporterait aucune force en siégeant avec eux et leur était plus utile dans la Chambre des pairs.

Il ne partageait pas le mécontentement que la plupart des gens de notre opinion exprimaient contre la faiblesse du cabinet Martignac. Il disait hautement qu’il était insensé de lui demander ce qu’il lui était impossible d’obtenir des répugnances du Roi. Ce n’est pas la faute de monsieur Pasquier si ce ministère est tombé, car il le soutenait bien franchement et de tous ses moyens.

Après avoir cherché pendant quelque temps, un successeur à monsieur de La Ferronnays, on se décida à s’en passer. Les dettes que le dernier titulaire avait laissé à payer servirent de prétexte à ne le point remplacer. Monsieur Portalis prit le portefeuille par intérim.

Deux hommes avaient principalement agi pour obtenir