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ÉDUCATION DU DUC DE BORDEAUX

tention, et, peu de temps après, Mademoiselle tenait à récompense d’aller à pied, donnant le bras à madame de Gontaut et suivie à distance d’un valet de pied en habit gris, se promener, seule avec elle, dans les rues de Paris.

J’ai cité cette circonstance pour montrer combien le sang princier parle de bonne heure, et comme il est naturel qu’en vieillissant l’étiquette lui paraisse nécessaire à son existence.

Au reste, madame de Gontaut s’était vantée en affirmant qu’elle arrangerait la promenade à Bagatelle. Le baron de Damas, dans sa sapience, avait décidé de séparer les deux enfants. Il craignait pour monsieur le duc de Bordeaux l’habitude de vivre avec les femmes, et, dans son bigotisme, à mon sens bien immoralement indécent, avait commencé par défendre au jeune prince de huit ans d’embrasser sa sœur qui en avait neuf.

Tout le reste de l’éducation était également éclairé, et, hormis les exercices de gymnastique qu’il lui faisait faire comme s’il était destiné à débuter chez Franconi, le pauvre petit prince était élevé comme un moine et s’ennuyait à périr. La connaissance que le public acquérait de la culture qu’on donnait au souverain futur achevait de l’aliéner de celui qui régnait.