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SOSTHÈNE DE LA ROCHEFOUCAULD

j’attendais arrivèrent tard, sachant la nouvelle, et dans un état d’exaspération incroyable.

Tous appartenaient à la garde nationale, et tous étaient furibonds. À peine s’ils écoutaient les ordres que je donnais pour les travaux et, quand je leur parlais trumeaux, ils répondaient baïonnettes. Après avoir vainement cherché à les calmer par le souvenir de l’ennui que leur causait les gardes à monter, je renonçai à fixer leur attention et les laissai retourner dans leurs quartiers où ils allèrent rapporter leur fureur, après l’avoir fait partager à tout mon village. J’étais moi-même empressée de venir apprendre ce qui avait pu amener une si singulière péripétie.

Il n’y a jamais eu d’autres motifs ostensibles que ceux que j’ai déjà relatés. Cependant, j’ai peine à croire que monsieur de Villèle n’ait pas eu quelque arrière-pensée ignorée pour prendre une mesure si violente. Quoi qu’il en soit, à dater de cette époque, il devint la bête noire de la population parisienne et, bientôt, celle de toute la France.

Le duc de Doudeauville, ministre de la maison du Roi, comprit mieux que les autres la tendance de ce qui se faisait et donna sa démission à l’occasion de la dissolution de la garde nationale.

Je ne sais plus si c’est avant ou après cet événement qu’il faut placer une démarche de Sosthène de La Rochefoucauld que je tiens de lui-même et que je ne puis me refuser de répéter.

J’ai déjà dit le rôle qu’il avait joué entre monsieur de Villèle et madame du Cayla. Il est indubitable qu’il avait conduit monsieur de Villèle au pouvoir et qu’il l’y avait soutenu, par l’influence de la favorite, tant que Louis XVIII avait vécu. Depuis sa mort, monsieur de Villèle s’était émancipé d’une protection qui lui pesait.