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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

À dix heures du soir ces assemblées, qu’on désignait du nom d’appartement et où l’on assistait en costume de Cour, étaient finies.

On portait aussi l’habit de Cour pour les spectacles. Madame la Dauphine aurait voulu faire revivre l’usage de s’inscrire pour y être invité, mais cela ne put s’établir. Les capitaines des gardes envoyaient des billets, en avertissant de les rendre si on ne pouvait en profiter. Du reste, on pouvait leur en demander et même cela était bien vu, d’autant qu’il y avait rarement assez de femmes présentées pour remplir les grandes loges. Elles étaient principalement occupées par les personnes d’une piété assez affichée pour refuser d’aller au spectacle de la ville, quoique ce fussent les mêmes pièces jouées par les mêmes acteurs. Leurs directeurs faisaient exception pour le théâtre des Tuileries et les autorisaient à s’y aller divertir.

Les demoiselles, auxquelles on ne permettait pas Polyeucte au Français, étaient menées, en sûreté de conscience, voir un vaudeville grivois dans les petites loges de la salle royale. Au surplus, le coup d’œil était fort brillant, et la Cour avait grand air dans ces occasions.

On distribuait abondamment des rafraîchissements, très bons, dans des verres de cabaret et des soucoupes de faïence portés sur des plateaux de tôle. Rien de ce qui tenait au matériel n’était soigné chez le Roi. Madame la Dauphine n’avait pas de maison. Chez madame la duchesse de Berry, ces détails étaient bien entendus et fort élégants.

Monsieur de Villèle, poussé jusque dans ses derniers retranchements, ne put résister plus longtemps aux clameurs de son monde qui demandait la loi sur l’indemnité des émigrés. Cette fois, elle fut séparée du projet