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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

de monsieur de Chateaubriand. On lui en fit des compliments jusqu’au point de lui dire qu’il n’avait jamais rien écrit de mieux. Il n’a pu pardonner à Salvandy cette erreur du public dont il fut blessé de toute la hauteur de son incommensurable vanité.

Le roi Charles X dit quelques mots d’obligeance à monsieur de Brézé, grand maître des cérémonies, sur la manière intelligente dont il avait préparé et conduit les détails de la pompe funèbre.

« Oh ! Sire, répondit l’autre modestement, le Roi est bien bon ; il y a manqué bien des choses, une autre fois ce sera mieux.

— Je vous remercie, Brézé, répondit le Roi en souriant, mais je ne suis pas pressé. » Monsieur de Brézé s’effondra.

En prenant le titre de dauphine, madame la duchesse d’Angoulême renonçait à l’appellation de Madame qu’elle avait porté jusque-là. Madame la duchesse de Berry eut la fantaisie de se l’approprier. Elle en demanda l’autorisation au Roi qui lui répondit fort sèchement : « À quel titre ? Je vis et vous êtes veuve, cela ne se peut pas. »

En effet, si monsieur le duc de Berry avait vécu, il n’aurait été Monsieur qu’à l’avènement de son frère à la couronne. Mais la prétention de madame la duchesse de Berry avait une origine plus politique.

On avait été rechercher, pour elle, que la duchesse d’Angoulême, mère de François Ier, s’appelait exclusivement Madame, et c’était à la mère de monsieur le duc de Bordeaux qu’elle voulait faire déférer ce titre, se préparant ainsi une existence à part et peut-être une éventualité de régence le cas échéant ; mais elle ne jouissait pas d’assez de considération dans sa famille pour obtenir cette distinction, contre laquelle madame la Dauphine se déclara formellement.