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LE PRINCE DE CARIGNAN

déro a rendu ridicule jusqu’au nom d’un très joli fait de guerre qui décida la prise de Cadix et termina la campagne, si on peut donner ce nom à une marche triomphale de Bayonne à Cadix. Les partisans des Cortès se défendirent dans quelques villes ; mais, en général, l’armée française fut accueillie partout avec une grande joie.

Les populations des villages accouraient à sa rencontre. Le prince était reçu avec acclamation : « Viva el duca ! Viva le Bourbone ! Viva el re netto ? Viva la sacra santo inquisition ! », criait la foule qui couvrait l’escouade royale de fleurs et de guirlandes et déployait des tapis sous les pieds des chevaux.

Aussi le maréchal Oudinot disait-il en soupirant : « Ce qu’il y a de déplorable, dans cette affaire-ci, c’est que nos gens se persuadent qu’ils font la guerre. » Malgré cette exclamation chagrine du vieux soldat, nos jeunes troupes, toutes les fois qu’elles en eurent occasion, montrèrent leur zèle et leur intrépidité accoutumés ; et j’ai entendu dire à des officiers, ayant fait la vraie guerre, que notamment le petit fort du Trocadéro avait été emporté avec une vigueur digne des grenadiers de la grande armée.

Le prince de Carignan s’y distingua particulièrement. On lui a fort reproché d’avoir fait cette campagne contre les révolutionnaires. Elle lui avait été imposée comme amende honorable par la Cour de Sardaigne, et tout lui était bon pour sortir de la position intolérable où il se trouvait à Florence. Mais, quelque opinion qu’on puisse avoir sur la convenance de sa présence auprès de monsieur le duc d’Angoulême, tout le monde doit approuver la conduite qu’il y tint en passant, avec les premiers grenadiers, le fossé plein d’eau qui entourait la redoute.

Le lendemain, à la parade, une députation des gre-