Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome III 1922.djvu/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.
98
MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

prince. Aussi était-il abhorré par les courtisans de son père et de sa belle-sœur. Une puérile circonstance donnera mieux l’idée de la manière dont ils l’envisageaient que de longs développements.

À un déjeuner, assez nombreux, donné par le comte et la comtesse Fernand de Chabot pour l’inauguration d’un nouvel appartement, quelqu’un, impatienté des impertinences qu’on débitait sur monsieur le duc d’Angoulême, s’amusa à dire qu’il avait passé à l’ennemi à la tête de quatre régiments. « Vraiment, s’écria madame de Meffray, dame et favorite de madame la duchesse de Berry, vraiment ! est-il possible ? Je savais bien que monsieur le duc d’Angoulême pensait très mal, mais je ne le croyais pas encore capable de cela ! » Sans doute madame de Meffray était une niaise, mais ses paroles indiquent le diapason de l’intérieur où elle vivait.

Lors de la sage ordonnance d’Andujar, les clameurs contre le prince furent telles que le ministère fut obligé de la casser. À dater de ce moment, monsieur le duc d’Angoulême cessa de prendre aucune part politique aux affaires de la Péninsule, se bornant à ses devoirs militaires.

Il avait été grandement dégoûté par les procédés du roi Ferdinand VII qui, non seulement ne lui avait accordé aucune confiance, mais avait même affecté des formes grossièrement arrogantes vis-à-vis de lui. Ainsi, par exemple, lorsque monsieur le duc d’Angoulême, au moment où le Roi débarquait à Port-Sainte-Marie, lui avait présenté son épée en s’agenouillant, il lui avait laissé accomplir cette cérémonie de courtoisie, à la grande indignation des français présents, et se relever sans lui offrir d’assistance.

L’absurde étalage qu’on a fait de la prise du Troca-