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C'est dans une terre étrangère que j'ai appris les nouvelles horreurs commises envers mon roi et la dure captivité dans laquelle il est retenu. N'ayant pu me joindre à ceux qui ont si bien manifesté leur indignation par leur protestation générale, je me suis joint à eux le mieux que j'ai pu en adressant au rédacteur de l’Ami du roi et de la Gazette de Paris ma protestation particulière.

Je crois, Messieurs, avoir rempli mon devoir ; je crois avoir répondu à la confiance dont vous m'avez honoré. Lorsque je reçus cette marque précieuse de votre estime, lorsque vous daignâtes me choisir pour être votre représentant aux Etats-généraux, vous voulûtes sans doute récompenser en moi les vertus de mes ancêtres, je n'avais que ce seul titre pour prétendre à une faveur aussi distinguée. Une réflexion aussi simple et aussi naturelle je ne l'ai faite que plus tard ; je cédai d'abord à l'amour- propre, et comment pouvais-je me défendre de ce sentiment lorsque je me voyais comblé de vos bontés, lorsque j'avais réuni tous vos suffrages; je me crus capable de remplir la place qui m'était confiée par cette seule raison que je la tenais de vous. Mon erreur ne dura pas longtemps, je fus bientôt désabusé et l'expérience ne tarda pas à mettre mes faibles talents à leur juste mesure. Lorsque je me vis dans le sein de l'Assemblée je ne me trouvai plus dans ma sphère et je regrettai le repos et l'obscurité que j'avais perdus ; mais, hélas! mes regrets étaient tardifs, j'étais déjà lancé dans la grande carrière des affaires publiques ; je marchais en aveugle toujours prêt à s'égarer, et la crainte de faire des fautes me rendait moins clairvoyant sur le moyen de les éviter. Dans une position aussi difficile, j'adoptai un plan de conduite, ce fut celui que vous m'aviez dicté, c'était le seul qui put me mettre à l'abri de vos reproches, je ne craignais que ceux-là et je n'ambitionnais que vos éloges. Tous mes pouvoirs je les tenais de vous, vos instructions étaient des ordres pour moi et je puis dire que je m'y suis constamment conformé. J'ai soutenu, d'après mes lumières, les droits du trône, de la religion et de l'humanité ; j'ai défendu vos intérêts et ceux de la noblesse, de ce corps respectable qui est devenu la victime de la rage, et de la