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Le comble du crime et de l'horreur fut de voir l'Assemblée décharger de toute accusation M. le duc d'Orléans et M. le comte de Mirabeau. Je sais qu'un juge qui prononce ne doit juger que le fait, sans s'arrêter à la conduite passée du prévenu, et c'est ce qui m'a fait penser, comme à M. l'abbé Maury, que M. le comte de Mirabeau n'était pas prouvé coupable ; mais, comme il n'y avait aucun doute sur M. le duc d'Orléans, je me suis réuni à ceux qui ont protesté contre le décret qui a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à inculpation contre lui. Cette protestation a été rendue publique par la voie de l'impression.

Mon séjour à Paris après cette époque m'a donné lieu d'assister à la séance où on agita la question de prononcer que les ministres n'avaient pas la confiance de la nation. C'était étrangement attenter à l'autorité royale que de vouloir désigner à Sa Majesté les hommes qui doivent avoir sa confiance, au roi seul appartient le droit de choisir et de conserver les ministres qui sont à son gré, et une loi sur la responsabilité, telle qu'elle était demandée par les cahiers, était suffisante pour arrêter les dépré- dations ou les abus de pouvoir qui auraient pu s'introduire. Je fus donc de l'avis contraire à la proposition, avis qui passa au grand regret de ceux qui ont voulu anéantir l'autorité royale ; mais ils sont revenus sur ce décret, depuis mon absence, et ont obtenu gain de cause.

J'ai à vous parler maintenant, Messieurs, de mon opinion sur l'imposition foncière ; je voyais avec douleur un parti se former pour écraser les terres et soulager la capitale, mon opinion était bien contraire à de pareilles vues ; votre intérêt personnel, celui de la société, tout enfin m'engageait à trouver un moyen qui put arrêter l'esprit que l'on cherchait à introduire dans l'Assemblée. Je disais de fixer les regards sur l'agriculture, le plan qui en était la suite tendait évidemment au renversement du luxe, à l'augmentation des impositions indirectes et conséquemment à l'émigration de la capitale, de cette ville qui fut dans tous les temps la persécutrice de l'autorité royale, la ruine des provinces, et, qui plus est, particulièrement aujourd'hui le tombeau des mœurs et de la,