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C’était une vérité sentie par tout le monde : elle avait souvent excité les justes plaintes des militaires qui, après avoir sacrifié leur vie pour la patrie, ne trouvaient sur leurs vieux ans qu’une récompense toujours tardive et insuffisante. — Animé par tous ces motifs, sensible à la voix de l’honneur et de l’humanité, je crus devoir me permettre quelques réflexions sur un article aussi important. C’est sans doute à ces réflexions que je dus la place que l’on me donna dans le comité des pensions. M. Camus, encore plus célèbre par ses crimes que par ses talents, le plus cruel ennemi du trône et de la religion, le démagogue le plus enragé, fut choisi pour être président du comité ; il ne tarda pas à s’emparer de toute la besogne. — Ce fut à cette époque que je tombai dangereusement malade ; un jour où il me restait à peine assez de force pour me soutenir, et dans l’instant où je me disposais à partir pour une promenade en voiture qui m’avait été ordonnée, je vis entrer chez moi un commis qui, avec tout l’air de l’empressement, me dit avoir été envoyé par M. Camus pour me prier de signer tout de suite une épreuve. Je pouvais à peine tenir ma plume et j’étais hors d’état de lire ce que ce commis apportait, j’eus la faiblesse et la bonne foi de signer cet écrit qui l’était déjà par tous les membres du comité. Hélas ! j’étais bien loin de soupçonner tout ce qui était contenu dans ce livre infâme ; un honnête homme pouvait-il calculer toute la scélératesse d’un Camus! Quelle fut ma surprise lorsque, en sortant de chez moi, j’entendis crier le livre rouge? J’en achetai un exemplaire et mon étonnement redoubla lorsque je vis qu’on avait osé y insérer mon nom. Je ne pouvais en croire mes yeux, et si pour lors je n’eus suivi que les premiers mouvements de ma colère, j’aurais fait payer cher à M. Camus l’audace qu’il avait eue de m’associer à ses coupables projets ; c’était sur lui seul que tombaient mes soupçons, il était seul l’auteur de cette trame odieuse, c’était à sa demande que je venais de donner imprudemment ma signature, de laquelle il avait fait un si mauvais usage. Je lui écrivis pour lui témoigner le mépris qu’il m’inspirait, et sachant qu’il travaillait à répondre à un