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sur les confins du Rouergue en chantant alternativement des psaumes et précédés de leur prieur portant la croix.

Là, au centre d'une grande forêt « in loco horroris », la pieuse colonne trouva un lieu qui lui parut convenable pour y bâtir une demeure, y fixer son séjour et s'y livrer à la prière et à la pénitence. C'est autour du mamelon dont nous avons déjà parlé que les moines s'établirent provisoirement, en attendant qu'ils pussent y bâtir le monastère qui plus tard fut appelé LOC-DIEU.

C'est ainsi que, en l'année 1123, cette colonie de pieux religieux fut la première de la règle de Saint-Benoît et de l'ordre de Cîteaux qui soit venue s'établir en Rouergue, et y former la première de ces fermes-modèles ou phalanstères chrétiens connus sous le nom de monastères, qui ont défriché, fertilisé nos contrées et civilisé notre pays[1].

Après avoir planté la croix sur l'antique dolmen du Puech-d'Elves, les moines songèrent à jeter les fondements d'un monastère ; mais auparavant deux choses leur étaient indispensables.

Il fallait d'abord l'autorisation de l'évêque de Rodez, Adhemar III, sous la juridiction duquel se trouvait cette partie de la forêt, et sans laquelle ils ne pouvaient entreprendre aucune oeuvre de ce genre.

Il leur fallait ensuite aussi l'agrément du seigneur propriétaire de la terre sur laquelle les moines désiraient s'établir. Voilà pourquoi la Gallia christiana (t. 1, p. 262) rapporte ces deux choses : Impetrarunt a viro nobili nornine Arduino de Paris licentiam construendi monasterium, cum jussione Ruthenensis episcopi.

Ce fut donc par cette double démarche que commencèrent nos cénobites avant d'entreprendre de bâtir leur monastère.

  1. Le monastère de Loc-Dieu, de l'ordre de Cîteaux, fondé définitivement en 1124, fut bientôt suivi par celui de Sylvanès, en 1136 ; celui de Beaulieu commencé en 1140, suspendu sinon abandonné, enfin fondé définitivement en 1144 ; de Bonneval, etc., etc , qui rayonnèrent sur le Rouergue.