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à entreprendre chez nous la tâche de pédagogie spéciale à laquelle ils ont l'un après l'autre attaché leur nom.

Je dis « chez nous, » parce qu'en effet, dans cette tâche, chez nos voisins du midi et du nord, on nous avait précédés. En Espagne , dès 1620, pour ne parler que des travaux imprimés, on avait vu paraître le livre de Juan Pablo Bonet, intitulé Reduccion de las letras y arte para ensenar a hablar las mudos. En Angleterre, en 1653, le savant professeur d'Oxford, John Wallis, avait publié, comme introduction à sa grammaire anglaise (écrite en latin), son excellente dissertation : De loquelâ sive sono- rum formatione, et, plus tard, comme appendice , une lettre à son ami Thomas Beverley sur l'enseignement de l'écriture et de la parole aux sourds-muets : De surdis mutisque informandis. Après lui, en 1692, Conrad Amman publiait en Hollande son Surdus loquens.

N'oublions pas, aussi, qu'en 1746 , l'académie de Caen était appelée à constater le succès des leçons données à un enfant sourd-muet par Jacob Rodrigues Péreire, l'aïeul des financiers nos contemporains, et qu'en 1747, 1749 et 1751, le Journal des savants et l'Histoire de l'Académie des sciences rendaient, des progrès des élèves particuliers que formait cet instituteur, alors à Paris, un témoignage auquel donne un poids considérable le nom de commis- saires rapporteurs tels que Mairan , Buffon et Ferrein. Malheureusement, le secret que Péreire faisait des pro- cédés de sa méthode en laissa les résultats mêmes ignorés au-delà d'un cercle peu étendu de savants.

Il était réservé à l'abbé de l'Epée de doter la France d'une véritable école pour l'instruction des enfants atteints de surdi-mutité.

Né en 1712, l'homme que nos sourds-muets, aujour- d'hui , aiment à nommer leur apôtre , approchait de 50 ans , ou avait, peut-être, de quelques années dépassé cet âge, et il demeurait tenu, par ses supérieurs ecclésiasti- ques , en dehors des fonctions paroissiales, en raison de ses opinions jansénistes, quand le hasard d'une visite lui fit rencontrer (suivant le récit de l'abbé Sicard, dans une maison de la rue des Fossés-St-Victor, située vis-à-vis du