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lui disputa encore quelque temps l'empire, non seulement à Rodez, que j'ai plus particulièrement en vue dans ce mémoire, mais aussi dans le reste de la province. Plusieurs des notaires de la ville chef-lieu, en effet, tels que Guillaume Moysset et George Bonheure, adoptèrent réso- lument le français vers le milieu ou sur la fin de 1539 et ne s'en départirent plus. D'autres , au contraire , tels que Durand Besombes et Jean Cassaignes, interprétant dans le sens le plus large l'ordonnance royale , firent, comme on dit, de la conciliation, en employant tantôt le français et tantôt le patois. Qnelques-uns enfin, peu disposés probablement à favoriser l'influence sans cesse croissante du nord sur le midi, n'admirent aucun mélange dans leurs actes , qu'ils rédigèrent, sans exception jusqu'à la fin de leur carrière, dans l'idiome que Peyrot, le bon et spirituel prieur de Pradinas, devait plus tard immortaliser par des poésies d'un mérite supérieur.

Cependant cette lutte entre officiers publics d'une même ville eut un terme , ainsi qu'il était aisé de le prévoir. Le français, le même quant aux mots sur tous les points du territoire national, finit par l'emporter sur son concurrent, grâce à la préférence qu'eut pour lui la génération des notaires succédant immédiatement à celle qui avait instrumenté sous le régime du latin abâtardi ; et il me paraît établi, après examen d'un grand nombre de registres notulaires déposés aux archives départementales de l'Aveyron , que ce triomphe ne fut complet et définitif qu'en 1565.

Voilà quelles furent les conséquences de l'ordonnance en question dans les études des notaires de Rodez. Voici maintenant et en peu de mots celles qui se produisirent dans les deux maisons communes de la même ville.

La Cité adopta le français pour ses délibérations municipales à partir du 5 novembre 1539, devançant à cet égard le Bourg de dix-neuf années, car celui-ci n'opéra sa réforme qu'à dater du 5 du même mois 1558. Par contre, cette dernière communauté se montra plus empressée quant aux rôles de contribution , dont les premiers avec le texte en français remontent à 1615, tandis que la Cité maintint le patois dans les siens jusqu'après 1665. En ce