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faudrait que les enfants pussent tenir le même langage ; par ce moyen ils initieraient leurs parents dans l'usage de la langue française.

Ici, il me semble entendre cette réponse : « Mais c'est aux curés de campagne à initier dans l'usage de la langue française leurs paroissiens en leur prêchant en français. »

Mais qui donnera à nos auditeurs l'intelligence d'une langue qu'ils n'ont jamais apprise et qu'ils comprennent à peine ? Oui, quand la génération qui grandit aura remplacé celle qui s'en va, la prédication en français n'aura pas autant d'inconvénients. Vouloir la faire aujourd'hui, ce serait une chose prématurée , prêcher dans le désert et favoriser l'ignorance. Aussi ai-je admiré la prudence de notre vénérable évêque qui s'est contenté, dans un de ses mandements, de faire l'éloge de la langue française, d'engager les prêtres de son diocèse à favoriser son usage, mais qui s'est bien gardé de leur ordonner de prêcher toujours en français !

Et même quand la nouvelle génération aura succédé à celle qui commence à disparaître, il sera encore bon que les pasteurs donnent dans nos églises une instruction en patois, ne fût-ce que pour conserver l'usage de la langue de nos ancêtres? Cette instruction sera toujours la plus utile au peuple, et l'homme savant ne dédaignera jamais d'entendre « un langage énergique, naïf, abondant en saillies et en tours heureux , que le français pourrait lui envier[1] ». Et qui ne sait que la vaste enceinte de notre cathédrale peut à peine contenir toutes les conditions , tous les âges, tous les sexes, quand aux mois de novembre et de décembre le digne pasteur de cette paroisse prêche en patois ses éloquentes instructions matutinales ? « Je n'aurais jamais cru, disait, en sortant du prône , un homme distingué par ses talents, qu'on peut s'élever à ce degré d'éloquence en employant la langue patoise. »

Mais l'auteur du catéchisme rouergas a donné encore

  1. Mandement de Mgr Croizier, évêque de Rodez, sur la langue française.