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et de sa gloire. Sans doute le bonheur est grand des hommes qui après eux peuvent laisser de telles impressions ; mais c’en est un aussi, et peut-être un plus grand, de les éprouver à ce degré.

À cette époque un changement se préparait dans l’existence jusque-là si douce de notre jeune naturaliste. Des événements aussi grands que peu prévus venaient de tout déplacer en France. Le pouvoir n’était plus que le produit journalier de la faveur populaire, et chaque mois voyait tomber à l’essai quelque grande réputation, ou s’élever du sein de l’obscurité quelque personnage jusque-là inaperçu. Tout ce que la France avait d’hommes de quelque célébrité furent successivement invités ou entraînés à prendre part à cette grande et dangereuse loterie ; et M. de Lacépède, que son existence, sa réputation littéraire, et une popularité acquise également par l’aménité et par la bienfaisance, désignaient à toutes les sortes de suffrages, eut moins de facilité qu’un autre à se soustraire au torrent. On le vit successivement président de sa section, commandant de garde nationale , député extraordinaire de la ville d’Agen près de l’Assemblée Constituante, membre du conseil général du département de Paris, président des électeurs, député à la première législature[1], et président de cette assemblée[2]. Plus d’une fois placé dans les positions les plus délicates, il y porta ces sentiments bienveillants qui faisaient le fonds de son caractère, et ces formes agréables qui en embellissaient l’expression ; mais à une pareille époque ce n’était pas ces qualités qui pouvaient donner de la prépon-

  1. En septembre 1791.
  2. Le 30 novembre de la même année.