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DE M. LE COMTE BERTHOLLET.

ne diffère de l’acide vitriolique que par une plus grande proportion de soufre ; ce qu’il fut aisé de traduire dans la suite par une moindre proportion d’oxigène.

Il s’y en trouvait même qui, si Lavoisier en eût prévu les conséquences, l’auraient engagé à retenir cette théorie dans des limites plus justes.

Ainsi, en faisant voir[1] que l’air obtenu du foie de soufre, c’est-à-dire ce que nous connaissons sous le nom de gaz hydrogène sulfuré, se comporte à la manière des acides, M. Berthollet donnait déjà, sans que Lavoisier, ni lui, y prissent garde, le premier indice d’un ordre de faits qui, dans ces derniers temps, a obligé de restreindre beaucoup la doctrine de la formation des acides par l’oxigène.

C’est toujours avec un grand intérêt que l’ami des sciences observe ces tentatives plus ou moins heureuses, ces sortes de tâtonnements par lesquels des hommes de génie approchent quelquefois de la vérité sans y atteindre, et qu’il cherche à trouver leurs premières traces dans ces routes compliquées qui les y ont conduits ; mais ce qui, pour Berthollet et pour Lavoisier, donne un caractère particulier à cet intérêt, ce sont les conseils, le ton amical de celui à qui son âge et sa position donnaient de l’avantage, et la docilité du plus jeune et du moins expérimenté. Il est vrai que sa docilité était un peu lente pour les découvertes de Lavoisier, mais elle fut toujours prompte et complète sur ses propres erreurs ; et, par une justice distributive qui n’a pas toujours lieu dans ces sortes de matières, sa docilité

  1. Lu le 7 février 1778 ; Rapport le 28 février.