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chait de jouissances que dans ses travaux, il lui aurait suffi que ce nécessaire fût assuré. Par malheur il apprit au bout de bien peu de temps que les effets des passions humaines ne se laissent pas calculer si aisément que ceux des forces de la nature.

On se souvient avec quelle imprudence l’assemblée constituante se laissa induire par des esprits étroits à joindre encore des disputes théologiques à toutes les autres disputes qui agitaient la France, et à doubler ainsi l’âcreté des querelles politiques en leur donnant le caractère de persécutions religieuses. La nouvelle forme de gouvernement que l’on imposait à l’Église avait divisé le clergé, et les hommes qui voulaient porter la révolution à l’extrême, se faisaient un plaisir d’envenimer cette division. Les ecclésiastiques qui ne s’étaient pas soumis aux innovations furent d’abord attaqués dans leur fortune ; on les priva de leurs places et et de leurs pensions ; et M. Haüy, que sa piété scrupuleuse avait toujours retenu dans cette classe, se vit en un instant aussi pauvre que le jour où il avait ambitionné de devenir enfant de chœur.

Il se serait contenté encore de pouvoir vivre de son travail ; mais les persécuteurs ne se contentèrent pas d’une première vexation. Lorsqu’au 10 août 1792, le trône eut été renversé, l’une des premières mesures que prirent ou que laissèrent prendre les hommes cruellement légers dans les mains de qui tomba le pouvoir, fut d’emprisonner les prêtres qui n’avaient pas prêté le serment prescrit, et la célébrité de M. Haüy dans les sciences ne donna qu’un motif de plus de lui faire subir le sort commun.

Fort peu au courant dans sa vie solitaire de ce qui se pas-