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le même sel, se montrent-ils en cubes, en prismes, en aiguilles, sans que leur composition change d’un atôme, tandis que la rose a toujours les mêmes pétales, le gland la même courbure, le cèdre la même hauteur et le même développement.

Ce fut lorsqu’il était rempli de ces idées, qu’examinant quelques minéraux chez un de ses amis, M. Defrance, maître des comptes, il eut l’heureuse maladresse de laisser tomber un beau groupe de spath calcaire cristallisé en prismes. Un de ces prismes se brisa de manière à montrer sur sa cassure des faces non moins lisses que celles du dehors, et qui présentaient l’apparence d’un cristal nouveau tout différent du prisme pour la forme. M. Haüy ramasse ce fragment ; il en examine les faces, leurs inclinaisons, leurs angles. À sa grande surprise, il découvre qu’elles sont les mêmes que dans le spath en cristaux rhomboïdes, que dans le spath d’Islande.

Un monde nouveau semble à l’instant s’ouvrir pour lui. Il rentre dans son cabinet, prend un spath cristallisé en pyramide hexaèdre, ce que l’on appelait dent de cochon ; il essaie de le casser, et il en voit encore sortir ce rhomboïde, ce spath d’Islande ; les éclats qu’il en fait tomber sont euxmêmes de petits rhomboïdes ; il casse un troisième spath, celui que l’on nommait lenticulaire, c’est encore un rhomboïde qui se montre dans le centre, et des rhomboïdes plus petits qui s’en détachent.

Tout est trouvé ! s’écrie-t-il ; les molécules du spath calcaire n’ont qu’une seule et même forme : c’est en se groupant diversement qu’elles composent ces cristaux dont l’extérieur si varié nous fait illusion ; et partant de cette idée, il lui fut bien aisé d’imaginer que les couches de ces molécules s’empilant les unes sur les autres, et se rétrécissant à mesure, devaient