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de m. a. thouin.

sa place et ce que pouvait devenir son établissement, qu’étant tombé dangereusement malade en 1771, on n’hésita point à accorder sa survivance au comte d’Angivilliers, surintendant des bâtiments du Roi, homme de mérite et de probité, mais complètement étranger à tout ce qui a le moindre rapport avec l’histoire naturelle. On conçoit à quel point un homme tel que Buffon dut être blessé d’un pareil procédé, et cependant ce chagrin devint pour lui une occasion de nouvelles faveurs, et pour son établissement une source de prospérité. M. d’Angivilliers avait trop de délicatesse pour ne pas sentir qu’il avait eu un tort, et trop d’honneur pour ne pas vouloir le réparer. Les moyens dont il disposait comme surintendant des bâtiments furent désormais à la disposition de Buffon. Il poussa même l’attention jusqu’à lui faire ériger, aux frais du Roi, la belle statue que l’on voit encore au Muséum d’histoire naturelle.

Dès lors l’agrandissement et l’embellissement du jardin marchèrent d’un pas égal ; on en doubla l’étendue, on y construisit des serres proportionnées au nombre des plantes que les voyageurs recueillaient chaque jour ; l’École de botanique où, ce que l’on croirait à peine avoir été possible à l’époque dont nous parlons, les végétaux étaient encore rangés et nommés selon la méthode de Tournefort, fut replantée et disposée selon la méthode de Jussieu : les plantes furent désignées d’après la nomenclature de Linnæus ; dans le reste du jardin, des arbres étrangers utiles furent multipliés ; on y créa des pépinières propres à les répandre dans le royaume, et ce fut M. Thouin qui devint l’agent principal, presque le seul mobile de ces nombreuses opérations. Jamais on n’avait vu une plus heureuse activité : il se fit à la fois