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éloge historique

ordres de Bernard de Jussieu ce beau jardin de botanique de Trianon où Louis XV venait chaque jour oublier un instant et les pompes de sa cour et les soucis de son gouvernement. Les chefs des colonies, les navigateurs, se faisaient un devoir d’offrir en tribut au monarque les végétaux les plus rares des pays lointains ; et le prince à son tour s’en faisait un de distribuer ces richesses aux plus fameux botanistes. C’est ainsi que le jardinier Richard correspondait avec les Linnæus, les Haller, les Jacquin, et tout ce que la science possédait alors d’hommes de génie et de talent. Ses fils étaient aussi employés à ce commerce scientifique. Le plus jeune, nommé Antoine comme son père, fut un des voyageurs que Louis XV chargea d’enrichir sa collection de plantes vivantes. Il visita l’Auvergne et l’île de Minorque, et y fit de riches récoltes. La botanique lui doit quelques espèces précieuses. Son aîné, Claucle Richard, père de notre académicien, fut placé à la tête d’un jardin que le Roi avait acquis à Auteuil, et qui était une sorte de succursale de celui de Trianon. C’est dans ce jardin que naquit M. Claude-Louis Richard dont nous avons à vous entretenir. Il naquit donc au milieu des plantes ; il apprit à les connaître plutôt que les lettres de l’alphabet ; et il dessinait déja des fleurs ou des plans de jardin avant d’écrire correctement. Ainsi on peut dire de lui sans figure qu’il avait sucé la botanique avec le lait ; il ne se souvenait pas d’un moment de sa vie où il n’eût déjà été une sorte de botaniste ; et si jamais il fit d’autres études, ce fut toujours à la botanique qu’il les rapporta. C’était pour elle qu’il se perfectionnait dans le dessin, et presque pour elle seule qu’il se donnait la peine de suivre ses classes, et d’apprendre le latin et le grec. Cependant ses progrès n’étaient guère moin-