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corps. Ces actions vaso-constrictrices et vaso-dilatatrices peuvent, d’ailleurs, être obtenues non seulement par voie directe, c’est-à-dire par section ou excitation des nerfs correspondants, mais aussi par voie réflexe. Ainsi, la moindre excitation des centres nerveux, qu’elle soit spontanée ou qu’elle vienne du dehors, peut mettre en action ou, au contraire, paralyser dans telle ou telle région du corps les nerfs qui tiennent sous leur direction le calibre des vaisseaux sanguins. C’est ainsi, par exemple, que le visage rougit ou pâlit sons diverses influences morales, selon que les capillaires de la peau sont gonflés ou vides de sang, par suite de l’état des artérioles auxquelles commandent les nerfs. On comprend sans peine la variété infinie des phénomènes qui s’expliquent par cette découverte et qui montrent qu’elle est de premier ordre non seulement pour la Physiologie, mais encore pour la Médecine.

Phénomènes nutritifs, phénomènes calorifiques, influence du système nerveux sur les uns et sur les autres, tout cela se suit et s’enchaîne dans cette partie de l’œuvre de Claude Bernard, et c’est ce qui en fait l’admirable unité. Mais dès le début, dès 1847, il s’engageait en même temps dans une voie très différente et y faisait toute une autre moisson de découverte, qui tient dans son œuvre une place très importante, en étudiant l’action des divers poisons sur l’organisme animal. Le résultat général qui en découle, c’est que le poison n’agit pas sur l’ensemble du corps ou même de l’un ou de l’autre de ses organes, mais seulement sur l’un des éléments constitutifs des organes, spécial à chacun d’eux. La strychnine agit sur les cellules sensibles de la moelle épinière. Le curare tue les nerfs moteurs, ou plutôt leurs terminaisons dans le muscle il supprime donc tous les mouvements, en particulier les mouvements respiratoires, et provoque ainsi la mort par une asphyxie d’ordre mécanique. Mais le muscle n’est pas attaqué et continue de se contracter quand on l’excite ; ce qui prouve qu’il ne doit pas au nerf, mais possède par lui-même sa propriété caractéristique, la contracti-