Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 52.djvu/60

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XII

ces liens que l’on nomme des théories, destinées à dissimuler autant que possible les points obscurs et controversés, qui troubleraient sans profit l’esprit de l’élève qui débute. Ces deux genres d’enseignement sont, pour ainsi dire, opposés dos à dos. Le professeur de Faculté voit la Science dans son passé elle est pour lui comme parfaite dans le présent il la vulgarise en exposant systématiquement son état actuel. Le professeur du Collège de France doit avoir les yeux tournés vers l’inconnu, vers l’avenir ». Chargé à la fois de deux rôles aussi différents, quoi d’étonnant si le vulgarisateur pâlissait en lui devant le génial inventeur, et si le professeur se montrait aussi médiocre à la Sorbonne qu’excellent au Collège de France ?

La Sorbonne n’avait pu lui donner ni laboratoire, ni préparateur, ni budget, la chaire de Jussieu transformée ne possédant rien de tout cela. Au grand dommage de sa santé, il dut donc continuer à travailler dans son misérable local du Collège de France, dont l’insalubrité Gnit par lui être fatale. En 1865, il fut atteint d’une maladie grave, qui inquiéta ses amis et l’obligea à interrompre pour longtemps tous ses travaux de recherches. Les craintes des premiers temps dissipées, Pasteur, rencontrant Rayer qui soignait son ami avec une vive sollicitude « Vous jugez bien, lui dit-il, que tout danger a disparu ». — « Oui, répondit Rayer, c’était nécessaire ». « Belle et bonne parole, dit Pasteur en rapportant ce propos, expression du cœur autant que de la raison. »

Retiré à sa campagne de Saint-Julien, il occupa les loisirs forcés de sa longue convalescence à se replier sur lui-même, à reprendre un à un tous les anneaux de sa chaîne de découvertes, à préciser la méthode de plus en plus parfaite qui l’avait conduit d’abord à les forger, puis à les rattacher l’un à l’autre, à fixer les règles du contrôle qui en avait ensuite assuré la parfaite solidité ; à faire, en un mot, un minutieux examen de conscience physiologique. Le fruit de ces longues et profondes méditations fut un livre intitulé Introduction à la Médecine expérimentale,