Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 5.djvu/769

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
227
de m. banks.

avoir regardées ; il aurait craint d’enlever, écrivait-il à M. de Jussieu, une seule idée botanique à un homme qui était allé les conquérir au péril de sa vie. Dix fois des collections adressées au Jardin du Roi, et prises par des vaisseaux anglais, furent recouvrées par lui et rendues de la même manière ; il envoya jusqu’au cap de Bonne-Espérance pour faire racheter des caisses appartenant à M. de Humboldt, qui avaient été prises par des corsaires, et n’a jamais voulu en recevoir le remboursement : il se croyait, pour ainsi dire, solidaire de toutes les atteintes que ses compatriotes portaient aux sciences et aux arts. Bien plus, il se croyait obligé de réparer le mal que leur faisaient les autres peuples. Ayant appris, par les journaux, que notre confrère Broussonnet avait été obligé de fuir les bourreaux de sa patrie, il fit donner aussitôt à ses correspondans en Espagne l’ordre de ne le laisser manquer de rien. Ses secours l’atteignirent à Madrid, à Lisbonne, le suivirent jusqu’à Maroc. Lorsque le grand minéralogiste Dolomieu, par la plus insigne violation du droit des gens, et pour satisfaire la vengeance d’une femme passionnée, fut jeté dans les cachots de Messine, ce fut l’ingénieuse humanité de M. Banks qui pénétra la première dans le souterrain où il gémissait caché à tout l’univers, et qui lui donna, avec quelques soulagemens, des nouvelles de son pays et de sa famille : s’il ne parvint pas à le faire rendre à la liberté, ce ne fut pas faute d’employer tous les moyens imaginables auprès du gouvernement qui le détenait avec tant d’injustice. Et ce que M. Banks faisait pour nos compatriotes, il ne mettait pas moins de zèle à le demander pour les siens. Chacun se souvient de cette autre violation du droit des gens par laquelle des milliers d’Anglais résidant ou voyageant paisiblement en France furent déclarés prisonniers de guerre. M. Banks s’empressa de