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éloge historique

ce poste mobile, crurent tous s’honorer en prenant les avis de l’homme qui lui en avait donné de si avantageux.

Cependant M. Banks n’avait pas attendu ce moment de crédit pour donner carrière à ses vues. Dès 1766, un de ses amis se trouvant capitaine du vaisseau qui devait protéger la pêche de Terre-Neuve, il profita de cette occasion pour visiter cette plage. Ce n’était pas diriger ses premières courses vers le côté le plus attrayant ; mais bientôt il eut une occasion de se dédommager.

La paix de 1763 venait de rendre le repos à l’Europe et de rouvrir les mers ; tous les peuples cherchaient à réparer par de nouvelles entreprises le mal que leur avaient fait leurs dissensions. L’Angleterre sur-tout, victorieuse dans les deux hémisphères, et qui voyait de tous côtés s’offrir à sa fortune des carrières sans limites, montrait une énergie qui, dirigée par un chef ambitieux, aurait pu devenir funeste à l’humanité. Heureusement qu’à cette même époque un sceptre qui était presque celui de l’océan, tomba dans les mains d’un jeune monarque pur dans ses mœurs, simple dans ses goûts, et qui de bonne heure avait compris qu’une découverte utile pouvait honorer un règne autant que des conquêtes. Le premier parmi les princes, il eut l’idée d’aborder des pays nouveaux sans y porter la terreur, et de n’y faire connaître sa puissance que par ses bienfaits. Chaque fois que l’historien rencontre un pareil exemple, il est de son devoir de le montrer dans toute sa beauté : c’est sur-tout à l’historien des sciences qu’il appartient, pour remplir ce devoir, de s’élever au-dessus des misérables rivalités des nations ; et bien que celui qui a mérité cet hommage ait été si souvent et si long-temps en guerre avec la France, ce n’est pas sans doute devant une assemblée telle que la nôtre, que j’aurai à m’excuser de le lui avoir rendu.