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éloge de m. de beauvois.

soient raisonnables et sensibles, pour avoir le droit d’être traités comme des hommes ? Des nations éclairées ont porté des lois contre ceux qui exercent des cruautés envers des animaux ; et lorsqu’il s’agit d’êtres qui parlent, qui aiment, qui pleurent comme nous, est-il à propos de disputer sur leur origine et sur leur espèce ? D’ailleurs, c’est surtout pour l’intérêt des blancs, pour leur intérêt moral, qu’il est nécessaire d’affranchir les noirs ; car le plus grand mal de l’esclavage est peut-être la corruption qu’il produit dans les maîtres.

Quoi qu’il en soit, on comprend aisément dans quel parti dut se jeter un homme arrivé à Saint-Domingue avec de telles idées. Ce fut celui qui se nommait lui-même le parti patriote, et qu’on appelle communément le parti de Saint-Marc, d’après le lieu où se réunit la première assemblée générale dans laquelle il domina.

M. de Beauvois n’était pas de cette première assemblée ; mais il avait été élu à l’assemblée provinciale du Nord, qui siégeait au Cap-Français, et il y soutint toutes les mesures de l’assemblée de Saint-Marc. Dès le mois de janvier 1790, cette assemblée du Nord ayant rétabli de son autorité privée le conseil supérieur du Cap, que le roi avait supprimé quelques années auparavant, elle y avait appelé M. de Beauvois, à qui sa réception d’avocat donnait un titre à cet honneur : honneur cruel ; car il se vit contraint par là, en mars 1791, d’être un des juges du malheureux Vincent Ogé, mulâtre qui fut condamné avec plusieurs de ses partisans à un supplice dont le nom seul fait frémir aujourd’hui, pour avoir essayé de faire exécuter, par la force des armes, les lois que rassemblée Constituante avait rendues en faveur de sa caste.

Le parti de l’assemblée de Saint-Marc, continuant à do-