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luttes de la presse, faut-il souvent les envisager comme le simple résultat d’un calcul, comme une preuve d’habileté. Mais la lettre de Carnot ne permettait pas de se méprendre sur la sincérité de ses sentiments. Votre ouvrage, écrivait-il à celui qui venait de critiquer amèrement le fond, le style, je puis presque ajouter la ponctuation de son éloge, votre ouvrage est plein de génie…. Maintenant que vos casemates sont connues et éprouvées, la fortification va prendre une nouvelle face ; elle deviendra un art nouveau. « Il ne sera plus permis d’employer les revenus de l’État à faire du médiocre, quand vous nous avez appris à faire du bon. Quoique le corps du génie n’ait point l’avantage de vous posséder, nous n’en croyons pas moins avoir le droit de vous compter parmi ses plus illustres membres. Quiconque étend nos connaissances, quiconque nous fournit de nouveaux moyens d’être utile à la France, devient notre confrère, notre chef, notre bienfaiteur. » M. de Montalembert ne résista pas à des témoignages d’estime si explicites, si flatteurs. Le désaveu le plus formel de la malencontreuse brochure suivit de près la réponse de Carnot ; d’autre part, il faut bien l’avouer, les chefs supérieurs du génie furent tellement irrités des éloges qu’un simple capitaine s’était permis de donner à des systèmes qu’eux avaient repoussés d’autorité, qu’une lettre de cachet et la Bastille apprirent à notre confrère qu’à la veille de notre grande révolution, la liberté d’examen, cette précieuse conquête de la philosophie moderne, n’avait pas encore pénétré dans les habitudes militaires. Une semblable rigueur paraît inexplicable, alors même qu’on fait la plus large part aux exigences de l’esprit de corps et aux susceptibilités de l’amour-propre ; Carnot, en