elles-mêmes, du problème de la fortification, intéressèrent vivement le jeune officier. Il franchit ainsi, sans encombre, le passage ordinairement si pénible des théories savantes à une pratique fastidieuse, des brillantes illusions dont on se berce dans les écoles aux tristes réalités de la vie.
Le Mémorial de Sainte-Hélène dit que, dans sa jeunesse, « Carnot passait parmi ses camarades pour un original. » Cette qualification, Napoléon l’avait empruntée à Carnot lui-même je la trouve dans la réponse à Bailleul, mais expliquée, mais commentée, mais dépouillée de ce vague qui permet de la considérer à volonté comme un compliment ou comme une injure. Carnot à vingt ans était, pour les officiers de la garnison de Calais, un orignal ou un philosophe (de ces deux mots l’un valait l’autre), parce qu’il ne s’associait ni à leur turbulence, ni à aucune de leurs fredaines ; parce qu’il vivait dans les bibliothèques plus qu’au café ; parce qu’il lisait Thucydide, Polybe, César, de préférence aux ouvrages licencieux de l’époque parce que s’il avait d’intimes relations avec le commandant général de la Picardie, le prince de Croy, c’était non pour obtenir des permissions, des allégements de service, mais pour l’aider dans des recherches géographiques délicates, pour travailler à des cartes de l’hémisphère sud, où devaient figurer les dernières découvertes des navigateurs. Carnot, cependant, n’était rien moins qu’un censeur morose. Sévère envers lui-même, il avait pour les autres un fonds d’indulgence inépuisable. Ses moments de loisir ou de délassement, il les employait à composer de petits vers, empreints toujours d’une gaieté douce et de bonne compagnie. Citer des chansons dans la biographie d’un géomètre, c’eût été certainement une nouveauté ; ce faible mérite, tout à