DE M. DE JUSSIEU. XV
mique leur a échappé ; et il n’était guère possible qu’il en fût autrement, ils connaissaient trop peu de plantes.
Tl n’y en a que cinq cents dans Théophraste, six cents dans Dioscoride, huit cents dans Pline.
L’ordre naturel, le véritable ordre des êtres, a ses matériaux dispersés sur toute la surface du globe. On peut le comparer à un édifice dont on n’aurait que les débris disjoints et bouleversés, dont on n’aurait pas même, à beaucoup près, tous les débris, et dont il s’agirait néanmoins de rétablir la structure. On conçoit que, plus il manquerait de ces débris, plus la restauration serait difficile, qu’il pourrait en manquer beaucoup trop pour qu’elle fût possible, et que, pour être rigoureusement sur qu’elle est exacte, il faudrait nécessairement les avoir tous.
Dès la fin du moyen âge, des découvertes étonnantes se succèdent ; la plus étonnante est celle d’un nouveau monde. La curiosité des hommes, éveillée par ces grands événements, les porte à des explorations plus énergiques et plus hardies. Les sciences renaissent, les grands voyages commencent, et le nombre connu des êtres s’accroît avec une rapidité qui va croissant elle-même, et dans une proportion très-digne d’être remarquée, à mesure que l’on s’approche de notie époque.
Pour ne pas sortir ici de la botanique, le nombre des plantes, qui n’est encore, dans les premiers auteurs du XVFsiècle, que de huit à neuf cents, est déjà, vers la fin de ce sièc^le même, de plus de deux mille ; il est, au siècle suivant, de plus de dix mille dans Tournefort, en y comprenant les variétés ; réduit aux seules espèces proprement dites, ce nombre est de sept mille dans Linné ; il est de vingt mille dans M. de Jussieu, et il s’est quadruplé depuis ; il sera de près de quatre-