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DE M. DE JUSSIEU. XIIJ

il leur a échappé à tous deux, comme on voit, par la niênie cause, parce qu’ils n’ont pas connu l’importance rehttive des caractères. Il y a plus, c’est qu’à prendre tous les botanistes depuis Gessner, tous ceux qui ont rencontré juste dans leurs essais, tous ceux qui ont saisi quelques fragments de l’ordre naturel, tous ceux-là suivaient, à leur insu, l’importance des caractères. Il y a plus encore, c’est qu’il y a des familles naturelles toutes faites, comme celles àes graminées, des composées, des ombellijeres. Qu’on étudie ces familles : tout caractère qui varie dans une d’elles est subordonné, secondaire ; le caractère primitif, essentiel, le caractère important, embrasse la famille entière.

Il y a donc un ordre, une graduation, une subordination dans les caractères ; le vrai problème est donc de commencer par classer ces caractères, d’après lesquels se classent, à leur tour, les êtres. Or, c’était là une face toute nouvelle de la science. Bernard de Jussieu qui avait introduit le principe de l’importance relative des caractères dans la classification des plantes, n’avait pas assez dégagé ce principe du point de vue pratique ; en l’élevant au point de vue théorique, en le généralisant par cette transformation même, Laurent en faisait mieux, sentir toute la portée ; il consommait la grande révolution commencée par son oncle ; il créait la philosophie de la méthode.

Lorsque M. de Jussieu écrivait ces deux mémoires, premiers germes de tout ce qu’il a fait par la suite, Bernard et Linné vivaient encore. Bientôt ces deux grands naturalistes moururent, Bernard en 1777, et Linné l’année suivante. Dès lors la première place fut libre, et tout le monde sentit que