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Ses amis, par intérêt pour lui, le défièrent en quelque sorte : il s’attacha à leur prouver son dire par le fait, et en six mois d’un travail sans relâche, il eut écrit sa Flore française[1]. Cet ouvrage n’a ni la prétention d’ajouter des espèces à la liste de celles que l’on savait être indigènes de la France, ni même de donner de celles-ci une connaissance plus approfondie, ce n’est qu’un guide qui, partant des conformations les plus générales, divisant et subdivisant toujours par deux, ne donnant chaque fois à choisir qu’entre deux caractères opposés, conduit son lecteur, pour peu qu’il entende le langage descriptif et qu’il fasse usage de ses yeux, le conduit, dis-je, comme par la main, et le fait arriver inévitablement, et même en s’amusant, à la détermination de la plante dont il cherche le nom. Cette sorte de dichotomie, ou de bifurcation perpétuelle, est implicitement comprise dans toutes les méthodes distributives, elle en est même le fondement nécessaire ; seulement, les auteurs récents, pour abréger, avaient cru pouvoir présenter ensemble plusieurs embranchements : M. de Lamarck, à l’imitation de quelques botanistes anciens, les développa, les exprima tous, les représenta par des accolades, et le plus simple lecteur, sans initiation préalable, put en le prenant pour guide se croire botaniste. Son livre, paraissant à une époque où la botanique était devenue une science à la mode, où l’exemple de J.-J. Rousseau et l’enthousiasme si général qu’il inspirait en avaient même fait l’étude de beaucoup de femmes et de gens du monde, eut un succès

  1. Flore française, ou Description succincte de toutes les plantes qui croissent naturellement en France ; 3 vol. in-8o, Paris, 1778.