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il avait fait avec Borlase. M. Davies Gilbert, aujourd’hui président de la Société royale, se chargea de la négociation, qui ne fut pas longue ; car l’apothicaire, qui apparemment se souciait peu de découvertes scientifiques, et moins encore de métaphysique ou de poésie, ne faisait pas grand cas de son garçon ; et ce fut en le qualifiant de pauvre sujet, qu’il rendit de très-bon cœur à la liberté l’homme destiné à devenir si tôt après la lumière de la chimie et l’honneur de son pays.

Beddoes mesurait les hommes à une autre échelle ; s’apercevant promptement de la portée de l’esprit de son nouvel assistant, il ne l’employa pas seulement comme un aide passif, il lui confia son laboratoire, et lui permit d’y faire toutes les expériences qu’il jugerait propres à étendre la science des gaz, lui accordant même l’usage de son amphithéâtre pour y faire des leçons.

C’est dans l’Institution pneumatique que M. Davy découvrit, en 1799, les propriétés du gaz oxide nitreux, ou, comme on l’appelle aujourd’hui, du protoxide d’azote, et les effets extraordinaires qu’il exerce sur certaines organisations. Bien des personnes, quand elles le respirent, n’en éprouvent que du malaise ou un commencement d’asphyxie ; d’’autres sont même asphyxiées véritablement ; mais il en est chez lesquelles il produit une ivresse d’un genre tout particulier, qui leur donne, disent-elles, une existence délicieuse, un bien-être supérieur à tous les plaisirs connus, et tel qu’elles se laisseraient mourir dans cet état, sans faire le moindre effort pour en sortir, s’il ne cessait de lui-même au bout de quelque temps.

On peut juger de l’empressement avec lequel cette nouvelle manière de s’enivrer fut reçue dans un pays où l’ancien procédé