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éloge

de ce public si léger, mais si sensible ; il maudit son indifférence. En quelques jours, une souscription de trois millions fut remplie ; l’académie dressa le plan de quatre hôpitaux à ériger dans des quartiers convenables, et, pour ne rien omettre d’utile dans le détail de l’exécution, elle envoya MM. Tenon et Coulomb en Hollande et en Angleterre, les chargeant de visiter les hôpitaux les plus célèbres par leur bonne organisation, et d’y recueillir tout ce que l’expérience et la science avaient pu y découvrir d’avantageux.

M. Tenon touchait enfin au but qu’il n’avait cessé d’envisager dès l’enfance, lorsque, en 1788, un gouvernement, réduit aux derniers expédiens, porta la main sur ce dépôt sacré, et anéantit, en un instant, l’œuvre de la bienfaisance et l’espoir du malheur. Parmi les nombreuses fautes de ce ministère, dont l’ineptie accéléra si fort la catastrophe de la France, celle-là fut sans contredit l’une des plus honteuses, et qui contribua le plus à lui attirer ce mépris dont sitôt après le roi et la nation furent les victimes.

Il n’a fallu rien moins que les événemens terribles qui, en nivelant tout, ont permis de tout reconstruire à neuf, pour que l’on pût mettre en commun les ressources des hôpitaux de Paris, répartir les malades selon les espaces, et donner à tous des soins également bien entendus.

L’on ne reçoit plus aujourd’hui que mille individus environ dans cet édifice, où il s’en accumulait quelquefois trois à quatre mille ; on n’y voit plus ni femmes en couche, ni insensés ; les maladies y sont séparées comme elles doivent l’être, et l’ordre y est si admirable, que la fièvre d’hôpital ne s’y montre pas et que les plus affreuses contagions, apportées par des armées battues et manquant de tout, sont venues s’éteindre dans le même lieu qui en était autrefois le foyer le plus actif.

Il s’en faut toutefois de beaucoup que la mortalité y soit réduite au même point que dans les autres hôpitaux, tant sa position et sa construction sont insalubres. Aussi M. Tenon