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écartées, quel serait l’héritier mâle ? Le roi défunt laissait : 1o en Angleterre, un neveu, Édouard III (Édouard était fils d’Isabelle, sœur elle-même des trois derniers rois de France. Il était donc le petit-fils de Philippe le Bel) ; 2o en France ; deux cousins germains, descendant par les mâles de Philippe le Hardi, à savoir Philippe de Valois et Philippe d’Évreux, ce dernier plus jeune que son cousin de Valois[1]. Cette différence d’âge ne laissait subsister que deux concurrents sérieux, Édouard et Philippe de Valois. Une question nouvelle se posa donc : question toute voisine de la précédente et dont la solution ne paraît pas douteuse à un moderne. Je l’énonce en ces termes : Une femme qui ne possède pas par elle-même de droits successoraux peut-elle transmettre à ses héritiers mâles des droits qui ne lui ont jamais appartenu et, en aucun cas, n’auraient pu lui appartenir[2], ou, pour me servir d’une heureuse expression, peut-elle leur

  1. « Sed quia, decurso congruo tempore, filiam peperit, regnum Francorum Philippo, comiti Valesii, eo quod major natu erat consobrino suo, Philippo comite Ebroicensi, jure ejusdem regni obvenit. » (Chronographia regum Francorum, édition Moranvillé, t. I, p. 292 ; Chronique latine anonyme, publiée par Kervyn de Lettenhove, à la suite de Istore et Croniques de Flandres, t. I, p. 533.) Secousse parle des prétentions de Philippe, comte d’Évreux, époux de Jeanne de Navarre, fille de Louis X. Ce Philippe, fils de Louis, comte d’Évreux et petit-fils de Philippe le Hardi, est le père de Charles le Mauvais. (Voir Secousse, Mémoires pour servir à l’histoire de Charles II surnommé le Mauvais, Paris, 1758, t. I, p. 19.) Philippe d’Évreux est né en 1305 et mort en 1343 ; Philippe VI est né en 1293. (L’art de vérifier les dates, t. I, p. 594 ; t. II, p. 806.) Charles le Mauvais est né en 1332. (Secousse, ibid., p. 24.) Il faut ajouter que la branche de Valois est la branche aînée et la branche d’Évreux la branche cadette.
  2. « Ubi ergo mater nullum jus haberet, per consequens nec filius : aliter accessorium esset principalius principali. » (Continuateur de Guillaume de Nangis, édit. Géraud, t. II, p. 83, 84.) Or on sait que « accessorium naturam sequi congruit principalis ». (Sexte, V, xii, De regulis juris, regula 42.) Joignez Froissart : « Car, ensi comme il voelent dire et maintenir, li filz de fumelle ne poet avoir droit ne succession de par sa mère venant là où sa mère n’a point de droit. » (Froissart, I, 2, 42, édit. Luce, t. I, p. 11, 84.) Ce passage est emprunté par Froissart à Jehan le Bel, édit. Polain, t. I, p. 7.