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perdre et se confondre dans la fortune et dans les domaines du mari de la reine, n’être pour lui qu’un appoint et une valeur secondaire. Loin d’être absorbée par un roi étranger, la France fût vraisemblablement devenue peu à peu, entre ces mains nouvelles, une force centrale et absorbante[1]. Car ce n’est pas le roi qui fait la nation ; c’est la nation qui fait le roi.

J’ajoute que l’héritière du trône ne se fût jamais mariée sans le consentement des grands, peut-être des états : circonstance qui très probablement eût aussi contribué à sauvegarder des intérêts de la France.

Le jour où un roi d’Angleterre, héritier par les femmes, se porta prétendant au trône de saint Louis, cette revendication redoutable, dont il me reste à parler, se heurta à une résistance désespérée et vraiment nationale. Mais le respect incontesté d’une loi successorale portant exclusion des femmes ne saurait préserver à coup sûr une nation d’un péril de ce genre ; car un compétiteur descendant par les mâles peut surgir, lui aussi, à l’étranger.

III

L’exclusion des descendants par les femmes.

Les filles de Charles le Bel étaient, je l’ai dit, exclues sans conteste. Mais ici surgissait une autre difficulté. Les femmes

  1. Il semble que les Anglais aient eu conscience de cette situation, car Édouard III, à peine a-t-il pris définitivement le titre de roi de France, sent le besoin de tranquilliser ses sujets : « Scientes insuper quod nolumus, nec intentionis nostræ existit, quod, ex assumptione nominis et honoris eorumdem, dicto regno ac terræ Angliæ aut statui, seu juribus eorumdem, præjudicetur, aut aliqualiter derogetur. » (Rymer, Fœdera, II, ii, p. 1115.) Il existe une déclaration analogue du roi Henri V. (Daines Barrington, Observations on the more ancent statutes, London, 1775, p. 252-254.) Comparez les assurances données aux Gascons. (Rymer, Fœdera, II, ii, p. 1127.)