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toulouse en 1764

de l’abbé Barrère. : C’est le premier moment d’où je puis datter ma liberté, et, chose étrange, je n’en fis pas mauvais usage. Cette position nourrissait une teinte prématurée de mélancolie. Elle vint se mêler à mon caractère pour ne plus me quitter et s’associer à des passions ardentes…

« Cependant, mon imagination n’étant pas assez occupée par l’étude, tout ce que je voyais l’excitait à un point extrême. J’étais tout amour… mais, quand je dis l’amour, je me fais honneur, car la servante de la maison représentait pour moi la nature entière, occupait mon âme dans l’oisiveté et l’ignorance, autant que les beautés de la ville… Je n’osais aborder ces dernières ; elles auraient dû faire toutes les avances… Avide de savoir tout ce que j’ignorais, je ne voyais encore que par les yeux du corps, toujours forcé de contempler jusque dans ses scènes les plus cachées la comédie de la vie. Je riais souvent des bizarreries populaire, des grelots et de la marote languedocienne. Superstitieux, ma tristesse douce et tendre en était soulagée. Plongé dans ces langueurs léthargiques qui excitent la pitié d’un censeur grave et inexorable, un évènement auquel je devais être entièrement étranger m’entraîna. Toulouze, fanatique de son Parlement mis aux arrêts par le duc de Fitz-James, était violemment agitée et demandait une réparation. Qu’avais-je à faire dans les querelles des Robinocrates dont je ne connaissais pas alors l’ambition et les injustices ? Beaucoup sans doute. J’apprends que je suis citoyen. Je veux des représentants du peuple, quelque nom qu’on leur donne. Les Toulousains étaient assemblés par groupes aux portes des églises et des parlementaires : les avocats tenaient des conférences au Palais ; je les suivais avec empressement. Bientôt, je me crois appellé à la noble profession de chevalier ez lois, eques legum, d’avocat, vir probus dicendi peritus. Mon parti est pris, je me fais avocat. »

Ici, une longue dissertation philosophico-juridique sur « les institutions morales, les lois civiles et pénales » de tous les peuples, depuis Justinien « l’assassin de Bélisaire »,